Par Eve d'ONORIO di MEO, Avocat spécialiste en Droit Fiscal et Lisa VANCOILLIE, Elève Avocat

La loi de finances pour 2018 a modifié les régles d'imposition à l'IFI des biens démembrés. Nous revenons sur les conséquences de cette réforme en faisant le point sur les opérations d'optimisations patrimoniales à mettre en place.
Le principe est que les éléments grevés d’usufruit sont compris, au titre de l’IFI, dans le patrimoine de l’usufruitier pour leur valeur en pleine propriété (article 968 du CGI).
Par exception, les actifs imposables dont la propriété démembrée sont compris respectivement dans les patrimoines de l’usufruitier et du nu-propriétaire suivant les règles de l’article 669 du CGI.
1) C’est le cas lorsque le démembrement de propriété a sa source dans la loi :
- Usufruit du conjoint survivant lorsque l’époux prédécédé laisse des enfants ou descendants (article 757 du Code civil) pour les décès intervenus depuis le 1er juillet 2002 ;
- Usufruit du conjoint survivant non divorcé et non séparé de corps qui ne bénéficie d’aucun legs ou donation (article 767 ancien du Code civil) pour les décès intervenus avant le 1er juillet 2002 ;
- Nue-propriété attribuée au conjoint survivant après réduction de la part réservataire des ascendants à l’usufruit de ladite part (article 1094 ancien du Code civil) ;
- Usufruit forcé du conjoint survivant en présence d’enfants d’un premier lit (article 1099 du Code civil).
Cette liste est limitative.
Lorsqu’il s’agit d’un usufruit conventionnel (article 1094-1 du Code civil), ou résultant de l’article 1094 du Code civil (hypothèse dans laquelle l’époux ne laisse ni enfant ni descendant) ou encore qui résulte de conventions matrimoniales (attributions testamentaires en présence d’un descendant par exemple) les biens sont imposés au nom de l’usufruitier.
L’usage d’une donation au dernier vivant entre époux peut donc avoir un intérêt pour conserver l’imposition des biens sur la seule tête de l’usufruitier et contourner les conséquences du démembrement de propriété légal.
De même, l’usufruitier reste seul redevable lorsque des conventions entre héritiers fixent l’usufruit du conjoint survivant à un montant supérieur à celui qui lui est conféré par la loi.
2) C’est également le cas lorsque le démembrement de propriété résulte de la vente d’un bien dont le vendeur s’est réservé l’usufruit à condition que la nue-propriété ne soit pas cédée à l’une des personnes mentionnées à l’article 751 du CGI (héritiers et leurs descendants, donataires ou légataires institués, à des personnes interposées entre le redevable et ses héritiers et donataires et père, mère, enfants et descendants, époux de l’héritier ou du donataire et si le redevable est marié les personnes qui ont pour présomptif héritier l’époux de l’usufruitier).
Toutefois, l’usufruitier est redevable de l’IFI sur la valeur de la pleine propriété du bien en cas de :
- Démembrement résultant de la donation de la nue-propriété du bien ;
- Vente de la nue-propriété à une personne et de l’usufruit à une autre que la cession de l’usufruit soit antérieure, concomitante ou postérieure à celle de la nue-propriété ;
- Apport pur et simple à une société ;
- Apport à titre onéreux seulement si la société bénéficiaire de l’apport en nue-propriété était contrôlée par l’une des personnes visées à l’article 751 du CGI.
La donation aux enfants avec réserve d'usufruit de biens immobiliers ou titres de sociétés gardent donc tous ses avantages avec l'imposition entre les mains du seul usufruitier.
Dans les deux cas relatifs aux apports, l’apporteur est tenu de déclarer dans son patrimoine la valeur en pleine propriété des biens dont il a conservé l’usufruit. Toutefois, il ne déclare pas la fraction des titres représentative des biens ou droits immobiliers imposables qui lui ont été remis en rémunération de l’apport de la nue-propriété à hauteur de cette fraction correspondant à la valeur de la nue-propriété.
3) C’est enfin le cas du démembrement de propriété résultant d’une donation ou d’un legs fait à l’Etat ou à certaines personnes morales (départements, communes, syndicats de communes, établissements publics nationaux à caractère administratifs et associations reconnues d’utilité publique, fondations reconnues d’utilité publique). Seul le droit de l’usufruitier est pris en compte dans le patrimoine de l’usufruitier à condition que le droit ne soit ni vendu, ni cédé à titre gratuit par son titulaire.
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