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Les effets fiscaux du divorce : article paru dans la Revue Fiscale du Patrimoine (Editions Lexis Nex


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Le divorce entraîne la dissolution de l’union civile des époux mais aussi de l’union fiscale. Le foyer fiscal disparaît et les époux redeviennent imposables séparément à l’égard de l’ensemble des impôts, quel que soit leur régime matrimonial précédent (1).

Par ailleurs, le divorce produit des conséquences patrimoniales susceptibles de donner lieu à imposition, les unes tiennent au règlement du passé avec le partage de la communauté (2) et les autres à la prévision de l’avenir par le versement d’une prestation compensatoire et de pensions alimentaires (3).

1. Imposition séparée à compter de l’année du divorce

  • Impôt sur le revenu

Le principe est l’imposition séparée, distincte et unique pour chacun des époux à compter de l’année du divorce pour toute l’année d’imposition. La date à retenir est celle à compter de laquelle les époux sont autorisés à résider séparément ou, à défaut, la date de l’ordonnance de non-conciliation. Toutefois, les conjoints peuvent être soumis à une imposition séparée avant le divorce dans l’un des cas suivants (CGI, art.6-4) :

  • Lorsque les époux sont séparés de biens et ne vivent pas sous le même toit ;

  • Lorsqu’étant en instance de séparation de corps ou de divorce, ils ont été autorisés à avoir des résidences séparées ;

  • Lorsqu’en cas d'abandon du domicile conjugal par l'un ou l'autre des époux, chacun dispose de revenus distincts.

L’année de la séparation, chacun des anciens époux est personnellement imposable sur les revenus nets dont il a disposé pendant l’année entière au cours de laquelle intervient l’évènement, ainsi que sur la quote-part des revenus nets communs lui revenant (à défaut de justification de cette quote-part, ces revenus communs sont partagés en deux parts égales).

Concernant les charges, la répartition est faite en tenant compte de la date de paiement et en fonction de la personne qui a effectué la dépense. Il en est de même pour les dépenses déductibles du revenu global (pensions alimentaires, frais d’accueil des personnes âgées, ...) ou ouvrant droit à réduction d’impôt. Des régimes dérogatoires sont prévus pour la répartition de la CSG déductible, pour l’imputation des déficits reportables et pour les régimes de défiscalisation immobilière.

En cas de résidence des enfants à titre principal chez l'un des parents, les enfants mineurs sont présumés être à la charge du parent chez lequel ils résident à titre principal (CGI, art. 194, I) selon la fixation de la résidence dans la décision de justice, sauf à rapporter la preuve contraire ou convenir d’une situation dérogatoire à celle de la décision (attestation cosignée des parents). La majoration de quotient supplémentaire est de 0,50 par enfant, et de 1 part à compter du troisième.

En cas de résidence alternée, les enfants mineurs sont en principe réputés être à la charge égale de l'un et de l'autre parent (CGI, art. 194, I). La majoration de quotient supplémentaire est de 0,25 par enfant et par parent, et de 0,50 par enfant et par parent à compter du troisième, sauf disposition contraire contenue dans la convention homologuée par le juge ou dans la décision judiciaire, en cas d'accord entre les parents, ou s'il est justifié que l'un des parents assume la charge principale des enfants. Aucune pension alimentaire versée à l’enfant ne sera déductible ou imposable.

  • Impôt de solidarité sur la fortune – ISF

Les époux sont imposés séparément en matière d’ISF à partir du 1er janvier suivant l’année au cours de laquelle le divorce est prononcé, si les époux séparés de biens ne vivent pas sous le même toit, ou si, en instance de divorce, ils ont été autorisés à résider séparément (ou à défaut à la date de l’ordonnance de non-conciliation). Chacun des époux redevient imposable sur ses propres biens, valeurs ou droits. En cas de biens communs ou indivis, il convient de régler au préalable les questions de valorisations afin d’éviter un redressement fiscal.

La prestation compensatoire versée sous forme de rente viagère présente un caractère indemnitaire et alimentaire et n’entre donc pas dans l’assiette de l’ISF pour le crédirentier. En revanche, le débirentier est quant à lui autorisé à déduire la valeur de capitalisation de la rente. La prestation compensatoire versée sous forme de capital entre quant à elle dans l’assiette de l’ISF de celui qui reçoit la somme.

2. Partage de la communauté

  • Droits d’enregistrement

Les partages de biens meubles et immeubles entre copropriétaires (biens communs ou indivis) sont assujettis à un droit d'enregistrement de 2,5 % ou à une taxe de publicité foncière (CGI, art. 746). Il est prévu une exonération de ce droit lorsqu’une des parties bénéficie de l’aide juridictionnelle (Rép. min. Guené : JO Sénat Q, 10 juin 2010, p. 1461 n° 11790).

Le droit de partage est exigible s'il est constaté ou relaté dans un écrit authentique ou dans un acte sous seing privé (pas de taxation si partage verbal).

  • Impôt sur les plus-values

La liquidation du régime matrimonial peut conduire à la cession de certains biens et générer une plus-value imposable dans certains cas. Il convient de noter qu’il n’y a pas d'imposition à la plus-value en cas de partage entre époux de biens dépendant d'une communauté conjugale ou de biens indivis (CGI, art. 150-0, A, IV et 150-U, IV).

La plus-value constatée à l'occasion de la cession de l'entreprise à un tiers est imposable dans les conditions de droit commun. Toutefois, la cessation de l'indivision n'entraîne les conséquences d'une cession d'entreprise qu'à l'égard du seul indivisaire qui se retire et non à l'égard de celui qui poursuit l'exercice de l'activité (voir notamment en ce sens Rép. Pringalle : AN 8 septembre 1979 p. 7151 n° 12432 et CE, 28 juill. 1999, n° 162756 : JurisData n° 1999-051523 ; BDCF 10/1999, n° 96 ; RJF 1999, n° 96).

3. Règlements patrimoniaux du divorce

  • Traitement de la prestation compensatoire

Le versement d’une prestation compensatoire peut entrer dans le champ d’application de l’IR ou des droits d’enregistrement.

La prestation compensatoire constitue pour son créancier un revenu imposable à l’impôt sur le revenu dans la catégorie des traitements, salaires, pensions et rentes viagères, et en contrepartie, le débiteur d'une telle prestation se voit accorder le droit de déduire son montant de son revenu brut global (CGI, art. 156, II, 2°) dans les cas suivants :

  • Versement de la prestation compensatoire sous forme de capital sur une période supérieure à 12 mois (C. civ. art. 275).

  • Versement de la prestation compensatoire sous forme d'une rente viagère (C. civ. art. 276).

  • Rente versée dans le cadre d'un divorce par consentement mutuel (C. civ., art. 278).

Les prestations compensatoires qui échappent à l'IR entrent dans le champ d'application des droits d'enregistrement dans les deux cas suivants :

  • Versement de la prestation compensatoire sous forme de capital sur une période inférieure à 12 mois : la détermination des droits d'enregistrement afférents à ce capital dépend de l'origine des biens destinés à le constituer (droit de partage de 2,5% pour les versements en capital effectués grâce à des biens compris dans une indivision post-communautaire ou droit fixe de 125 euros ou taxe de publicité foncière si droit immobilier)

  • Substitution d'un capital à une prestation compensatoire fixée sous forme de rente : imposition fixe de 125 euros (CGI, art. 1133 ter).

Le versement d'une prestation compensatoire fixée sous forme d'un capital ouvre droit à une réduction d'IR égale à 25 % du montant des versements effectués, des biens ou des droits attribués et dans la limite d'un plafond égal à 30 500 euros (CGI, art. 199 octodecies) si 3 conditions cumulatives sont réunies :

  • Le bénéficiaire de la réduction d’impôt doit être fiscalement domicilié en France au sens de l'article 4 B du CGI,

  • La prestation compensatoire doit être versée en totalité sous forme d'un capital,

  • L’intégralité des versements doit être réalisée sur une période maximum de 12 mois.

  • Traitement de la pension alimentaire

Les pensions alimentaires versées par un des ex-époux en exécution d’une obligation alimentaire sont imposables au nom de leur bénéficiaire (CGI, art. 79) et déductibles du revenu du débiteur (CGI, art. 156, II-2°).

Il en est ainsi pour la pension alimentaire versée entre époux si son versement résulte d’une décision de justice préalable.

La déduction (et donc l’imposition) des pensions versées pour les besoins d’un enfant mineur est subordonnée à ce que l’enfant ne soit pas rattaché au foyer fiscal de celui qui les verse, en présence ou non d’une décision de justice. Toutes les sommes versées pour les besoins de l’enfant mineur, en présence ou non d’une décision de justice, peuvent être déductibles.

La pension versée à un enfant majeur est imposable et déductible dans la limite d’un plafond annuel de 5 726 euros (pour les revenus de 2014) à condition que :

  • Les versements soient effectués au titre de l’obligation alimentaire ou en exécution d’une décision de justice,

  • L’enfant majeur ne soit pas rattaché au foyer fiscal du parent qui verse cette pension,

  • L’enfant majeur soit dans le besoin et que les ressources du débiteur soient compatibles avec le montant des versements.

Conclusion

Le succès d’une procédure de divorce repose en partie sur la qualité de l’appréhension de l’ensemble des problématiques fiscales liées à la dissolution de la communauté. Ainsi, un conseil fiscal est essentiel dans le cadre de la mise en place de la procédure de divorce. Le rédacteur des actes devra prendre en considération ces impératifs fiscaux, prévenir son ou ses clients d’un éventuel risque fiscal de redressements quant à la valorisation retenue des biens, estimer le coût ou l’économie fiscale des propositions formulées en termes d’imposition des revenus ou du patrimoine et surtout anticiper le coût de l’acte de partage de la communauté et des éventuelles cessions nécessaires à celui-ci.

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